Les dirigeants ouest-africains ont ordonné jeudi le déploiement d’une « force en attente » pour restaurer la démocratie au Niger après le coup d’État du mois dernier qui a renversé le président démocratiquement élu Mohamad Bazoum.
À la suite d’un sommet, les responsables du bloc régional de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest ont publié un communiqué qui donnait peu de détails et ne précisait pas la composition, le lieu et la date proposée de déploiement d’une éventuelle force d’intervention militaire.
Les chefs d’État ouest-africains se sont réunis à Abuja, la capitale nigériane, pour discuter des prochaines étapes après que la junte nigérienne a défié le délai fixé dimanche par le bloc pour réintégrer M. Bazoum.
Neuf des 11 chefs d’État attendus étaient présents, dont les présidents du Sénégal, du Ghana, de la Côte d’Ivoire, du Togo, du Bénin, de la Guinée-Bissau et de la Sierra Leone. Les dirigeants non membres de la Cedeao de la Mauritanie et du Burundi ont également participé à la réunion à huis clos.
« Il est crucial que nous accordions la priorité aux négociations diplomatiques et au dialogue comme fondement de notre approche », a déclaré le président nigérian Bola Ahmed Tinubu, qui dirige actuellement le bloc, avant la partie privée de la réunion.
Il a déclaré que les dirigeants doivent agir avec un « sentiment d’urgence », même s’il a semblé reculer par rapport à la menace antérieure du bloc de recourir à la force.
Le Nigeria possède la plus grande armée d’Afrique de l’Ouest, mais elle est enlisée dans les régions du nord du pays, où elle lutte contre une insurrection obstinée composée de Boko Haram et de l’EI, liés à Al-Qaïda.
Le Niger était considéré comme le dernier pays de la région du Sahel au sud du Sahara avec lequel les pays occidentaux pouvaient travailler pour contrer la violence extrémiste qui a tué des milliers de personnes et déplacé des millions de personnes.
La communauté internationale s’efforce de trouver une solution pacifique à la crise de leadership du pays.
Cela survient alors que la junte nigérienne a annoncé qu’elle avait formé un nouveau gouvernement, deux semaines après avoir assigné M. Bazoum à résidence.
Les chefs militaires ont annoncé cette décision à la télévision d’État, nommant 21 nouveaux ministres.
Ali Mahaman Lamine Zeine dirigera le gouvernement, avec des généraux du nouveau conseil de gouvernement militaire à la tête des ministères de la Défense et de l’Intérieur, selon le décret.
Les dirigeants ouest-africains doivent se réunir jeudi pour réfléchir à une action militaire contre la junte, dirigée par l’ancien commandant de la Garde présidentielle, le général Abdourahmane Tchiani.
Des décisions importantes sont attendues lors du rassemblement à Abuja, la capitale du Nigeria, selon un communiqué de la Cedeao mardi.
La Cedeao a déjà imposé des sanctions à la junte à la suite du coup d’État, ce qui a également incité l’UE et la France à réduire l’aide à ce pays appauvri.
Le bloc devrait privilégier la diplomatie plutôt que l’action militaire sur le terrain, qu’il considère comme un « dernier recours ».
Mercredi, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a réitéré sa profonde inquiétude quant au bien-être de M. Bazoum et de sa famille, toujours confinés à la résidence présidentielle.
Le président a déclaré à ses amis qu’il était maintenu en isolement, « privé de tout contact humain » et nourri avec du riz sec et des pâtes. Auparavant, dans un éditorial du Washington Post, il s’était décrit comme un « otage » dans sa résidence de Niami.
Avertissements et débat
La possibilité d’une intervention militaire au Niger a suscité un débat au sein de la Cedeao et suscité des avertissements de la part des pays voisins et de la Russie.
S’exprimant avant de s’envoler pour Abuja mercredi, le président de la Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embalo, a déclaré que l’avenir du bloc était en jeu à la suite des coups d’État survenus dans quatre États membres, à savoir le Mali, la Guinée, le Burkina Faso et le Niger.
M. Bazoum reste le seul président reconnu du Niger et les coups d’État doivent être interdits, a-t-il ajouté.
Les voisins du Niger, le Mali et le Burkina Faso, tous deux dirigés par des gouvernements militaires qui ont pris le pouvoir lors de coups d’État, ont déclaré qu’une intervention équivaudrait à une déclaration de guerre contre eux.
Il s’agit du cinquième coup d’État au Niger depuis son indépendance de la France en 1960.
L’élection du président Bazoum en 2021 a aidé le Niger à consolider des liens étroits avec la France et les États-Unis, deux alliés essentiels dans la lutte contre l’extrémisme croissant au Sahel.
La France a évacué ses citoyens du Niger et suspendu son aide au pays, tandis que Washington a suspendu ses opérations antiterroristes et évacué le personnel non essentiel de l’ambassade et leurs familles.
Des experts et des responsables américains ont averti que le coup d’État renforcerait les groupes terroristes actifs dans la région et réduirait les progrès réalisés dans la lutte contre le terrorisme.